vendredi 16 novembre 2012

Pour un Renouveau du Volontarisme Politique.


Avant toute chose, face à une problématique au lexique si riche, tâchons de définir avec précision et sans ambiguïté les concepts ici évoqués.

Le Volontarisme politique consiste en la conviction que l'action politique, elle-même instrument de la volonté, a vocation à modifier ou faire évoluer la réalité dans son acceptation la plus large, à favoriser le changement de paradigme. En s'inspirant de Schopenhauer, le volontarisme politique prône alors l'ascendant de la volonté sur toute représentation. Ce Volontarisme spécifique ne doit alors aucunement être confondu avec le volontarisme philosophique ou littéraire qui lui, lié à ce qu'on appellera plus tard les «  radicalités existentielles », développe un discours libertarien de méfiance envers tout pouvoir politique et se place donc en opposition radicale avec la première conception ici développée.Ces précisions étant faites, la question est alors de se demander par quels outils et par quels moyens une telle doctrine, une telle conviction, est en mesure d'apporter une réponse concrète et efficace aux divers et préoccupants problèmes soulevés par la crise économique, la crise de la dette et la crise politique.

Afin de répondre à cette question, je me permets de citer préalablement Edmund Burke: « Pour que le mal triomphe seule suffit l'inactivité des gens de bien ». Cette citation est révélatrice à elle seule des mécanisme et dysfonctionnements politiques et idéologiques qui ont rendu possible la situation politique, sociale et économique actuelle que nous connaissons en Occident tout particulièrement. En effet, comment renouer avec le volontarisme politique ? Tout simplement en le comprenant dans sa nature profonde afin de saisir enfin le champ des possibles de ses potentialités et le rendre enfin actif, opératif et plus seulement figuratif ! En effet,l'erreur la plus fatale fut de croire que parce que le volontarisme place par définition la volonté au coeur de son raisonnement, il en exclut nécessairement la raison ! Autrement dit, on oppose l'action d'une part et la réflexion, l'activité intellectuelle d'autre part ce qui revient tout simplement à dissocier le fond de la forme ! Cette dichotomie ne peut mener qu'à l'échec dans le domaine politique et je m'en explique immédiatement :
Les peuples aspirent de toute évidence à voter pour des représentants charismatiques, porteurs d'enthousiasme et d'espoir et ces évidences n'échappent bien évidemment pas à la classe politique dans sa totalité. Cependant, le temps passé en tribune ou en meeting n'est pas du temps passé à l'établissement d'un programme complet, ambitieux et réalisable mais bien au delà de cela, ce n'est également pas du temps consacré à l'édification de sa pensée propre, de son idéologie et pourrais-je même dire, de sa vision de l'Etat, de la République, de l'Europe ou même du Monde. L'importante pression exercée aujourd'hui par les médias sur les Hommes et Femmes à hautes responsabilités ne faisant qu'accentuer ce phénomène.

On comprend alors logiquement que de trop nombreux représentants et candidats politiques soient allés et aillent encore se présenter devant le peuple sans substantifique moelle dans leur pensée,dans leurs idées et dans leurs aspirations. A partir d'un tel point nodal, l'engrenage infernal est lancé... Le Politique n'étant plus en mesure de proposer une offre idéologique, conceptuelle et intellectuelle à destination de l'ensemble de la société civile, il se voit donc réduit au rôle de récepteur de doléances et donc d'exécutant d'une volonté globale dont il ne connait ni la nature réelle ni les ambitions. Mais les choses sont encore plus graves car tous les individus n'ayant pas les mêmes possibilités ou les mêmes aptitudes à faire entendre leurs voix et leurs souhaits, un deuxième déséquilibre qui est celui de la représentativité civile apparaît postérieurement au premier déséquilibre évoqué, touchant la représentativité politique. En un mot, les plus puissants et/ou les plus influents pourront se permettre d'imposer des mesures servant leurs intérêts propres auprès d'un dirigeant devenu je le répète simple récepteur de demandes et qui par absence de pensée propre et stratégie électoraliste, sera considérablement manipulable et nullement en mesure de réagir.

A un tel stade, la démocratie ne peut plus exister car elle est confrontée à une profonde dénaturation de la volonté générale qui devient volonté de certains et dégénère alors en ce que Rousseau dans son Contrat Social qualifie d'ochlocratie. La volonté générale devient alors soit volonté d'un groupe ou volonté de tous. Ainsi donc, on voit que par l'absence de pensée propre, de vecteur d'avenir et d'offre politique conjuguée à une vision strictement à court-terme, suffisante le plus souvent en vue de satisfaire des ambitions personnelles, la représentativité et la crédibilité du politique ne cessent de baisser au cours du temps en favorisant tout naturellement la tutelle de ce même politique à divers groupes, lobbys voire institutions. La Structure actuelle de l'Union Européenne, de type fédérale, favorisant de plus un pouvoir central incarné par la Commission Européenne au détriment des pouvoirs des gouvernements respectifs des Etats-Nations membres de cette union est un exemple révélateur parmi tant d'autres de la situation que je viens de décrire. Mais au delà de cette tutelle déjà inacceptable, la perte de représentativité évoquée précédemment engendre de manière logique un mécontentement voire une colère populaire qui s'ils sont laissés à eux-mêmes, peuvent nuire de manière très grave à la cohésion de la société civile en favorisant la montée de la violence physique, idéologique et de divers ressentiments. La poussée actuelle des partis extrêmes ou les fortes tensions inter-communautaires que nous connaissons actuellement en France comme dans de nombreux autres pays d'Europe en sont révélateurs.

Il est donc urgent de réinterpréter correctement et sans a-priori ce qu'est le volontarisme politique, c'est à dire de le concevoir comme un équilibre entre la réflexion et l'action. Si la volonté doit en effet posséder la capacité intrinsèque à dépasser une certaine représentation afin d'accéder à une autre, ce ne doit pas être une simple volonté de pouvoir mais une volonté nourrie par des convictions personnelles et profondes car seules ces convictions sont en mesure de donner du sens à l'engagement politique et à la vie de la cité en général. Le Politique doit donc impérativement cesser d'être un simple récepteur. Les diverses crises existent à toutes les échelles car aujourd'hui de nombreux responsables persistent à refuser de comprendre que la société civile demande évidemment à être écoutée et respectée mais attend également de la part de ces mêmes responsables une véritable et authentique offre politique, une capacité d'engagement et de prise de responsabilités voire de risques. Les peuples ne votent pas pour tel candidat car il semble plus malléable ou plus à même d'exécuter ce qu'on lui demande de faire car ces mêmes peuples ressentent le profond et noble besoin de faire confiance, de se sentir porté, guidé, accompagné par des profils charismatiques mais surtout avec une véritable ligne directrice.

L'art du politique est donc de combiner au sein d'une savante alchimie qui n'existe dans aucun livre, aucune école ou aucun rapport son offre propre initiale avec la demande et l'aspiration sociétale afin d'en tirer une offre politique réelle qui soit en mesure de vérifier deux critères fondamentaux au sein de la République : la fidélité à ses convictions et engagements premiers et la capacité à mettre ces mêmes convictions au service de l'intérêt général. Et pour que cela soit rendu possible, il est fondamental que la liberté absolue de conscience, en tant que pilier de l'idéal républicain, puisse être assurée en tout lieu et en toutes circonstances. En effet, de nos jours, le relais médiatique constitue un passage impératif pour tout politique souhaitant présenter ses idées et convictions propres à une audience la plus large possible. Et force est de constater que toutes les problématiques, tous les sujets, toutes les thématiques, à partir du moment où elles respectent les principes universels de tolérance et d'ouverture d'esprit, ne bénéficient pas de la même écoute ou de la même crédibilité. Plus précisément, pour reprendre un lexique employé précédemment, l'existence d'un paradigme ou d'une certaine approche vis à vis d'un problème donné ne doit pas nuire à l'existence d'un paradigme ou d'une vision autre, au nom de la remise en cause et du critère même de falsifiabilité de Karl Popper.

Le conformisme est la raison essentielle à ce phénomène et doit donc être combattu avec force et partout car c'est ce combat qui permettra l'authenticité de forme et de fond du message politique rendant enfin le volontarisme efficace et vecteur de progrès !

dimanche 2 septembre 2012

Droite Américaine et Droite Française.


Comme la plupart d'entre-vous le savent probablement, la Convention Républicaine s'est réunie il y a peu à Tampa en Floride afin d'officialiser la candidature de Mitt Romney à l'élection présidentielle en Novembre prochain face au candidat sortant Barack Obama.

Le parcours de Mitt Romney fut loin d'être facile et il ne parvient d'ailleurs toujours pas à faire l'unanimité au sein du camp républicain. On lui reproche en particulier son charisme quasi inexistant qu'il a eu bien du mal à dissimuler face à son plus solide rival, l'ultra-conservateur et charismatique Rick Santorum. Mais comme on le sait, celui qui gagne aux Etats-Unis, c'est celui qui a le plus d'argent et à ce petit jeu, le suspens ne pouvait être que de courte durée... Or une certaine partie de la droite française, que l'on pourrait qualifier de «  Libérale-Conservatrice » semble de plus en plus motivée et déterminée à apporter son soutien de manière explicite à la candidature républicaine de M Romney. En apparence, cette union des droites atlantistes semble positive, mais si on dépasse la composante de la communication pour plus s'intéresser au fond des idées et des philosophies politiques ( oui, il faut aussi réfléchir en politique...), on peut véritablement s'interroger sur la pertinence d'une telle démarche. Certes, la France et les Etats-Unis ont toujours tissé des liens étroits depuis Lafayette et Benjamin Franklin et leurs constitutions respectives, bien que différentes, partagent des sources d'inspiration assez proches.

Cependant, bien que la pluralité idéologique des droites françaises soit une réalité incontestable grâce en particulier au formidable travail de René Rémond, elles considèrent toutes ( mis à part l'aile légitimiste contre-révolutionnaire) l'héritage des Lumières et de la Révolution Française comme fondamental à travers les vecteurs de progrès, de justice sociale, d'état de droit et d'humanisme. Ces droites (orléaniste et bonapartiste) considèrent la République comme le meilleur système politique ( ou le moins pire ) basé sur l'idée que la quête de l'intérêt général doit demeurer la priorité absolue. Cette aspiration de la quête de l'intérêt général est en théorie partagé par les républicains américains. Cependant, cette théorie, une fois de plus, est assez vite contrariée par un ensemble de faits. En effet, la droite américaine, surtout depuis qu'elle est influencée par le Tea Party, devient de plus en plus libertarienne et aimerait mettre le pouvoir central de Washington au placard et laisser chaque état faire sa cuisine librement de son côté sans aucune contrainte( ce qui est déjà en partie le cas).

D'autre part, son libéralisme sans aucune limite l'empêche de véritablement développer une politique de justice sociale permettant même aux plus humbles d'avoir accès à la dignité et aux soins. Enfin, n'oublions pas que le conservatisme religieux joue un rôle fondamental outre-atlantique ce qui a pour conséquence majeure une méfiance voire défiance naturelle envers la Science. L'exemple de la propagation de la pensée Créationniste étant un exemple parmis tant d'autres. Or, du côté français, la droite républicaine s'efforce avec plus ou moins de succès de parvenir à un équilibre consistant en un état fort détenteur des fonctions régaliennes mais où l'initiative et la liberté d'entreprendre sont plus que tout encouragées. Bien évidemment, cet idéal est fragile et loin d'être atteint pour de multiples raisons qui ne font pas l'objet de cet article. Enfin, bien qu'il existe une certaine échelle des conservatismes en France, nul ne remet plus en question le Darwinisme et la Science parvient de plus en plus à se faire entendre à un tel point qu'on en arrive même à l'autre extrême, un propos devenant immédiatement crédible et vrai pour le simple fait qu'on invoque une quelconque «  approbation scientifique » jusque dans la publicité...

Pour toutes ces raisons évoquées précédemment, il ne me semble pas judicieux de la part de la droite républicaine française, même de son aile la plus libérale, d'apporter son soutien officiel à Mitt Romney. Elle y perdrait peut-être une part d'elle-même, une part de son humanisme voire de son universalisme, mais en constatant la nature des débats idéologiques actuels, peut-être est-ce déjà trop tard...

lundi 2 avril 2012

De l'Education en France.

La France, entendons-nous souvent dire, est le pays possédant le meilleur système éducatif au monde. En dépit du fait que cette proposition semble à première vue peu crédible étant donné qu'entre Juin et Septembre 2011, pas moins de 223 000 jeunes sont sortis du système éducatif sans diplômes ( sources ministérielles), si l'on souhaitait accorder une quelconque crédibilité à cette maxime, encore faudrait-il savoir sur quels objectifs nous nous projetons pour l'affirmer !

Et c'est très précisemment la réponse à cette question qui permet de juger de l'étendue du marasme français en matière d'enseignement car le but principal cherché n'est plus du tout de former des hommes et des femmes libres, de favoriser leur indépendance, de leur communiquer la notion fondamentale de citoyenneté ou encore de développer leur esprit critique. Bien au contraire, l'Ecole au sens large a pour mission actuelle de formater nos enfants dès le plus jeune âge en vue de leur inculquer des repères et des mentalités qui leur feront voir dans quelques années les conséquences les plus insupportables du Mondialisme comme des banalités, des constats normaux que les diverses sociétés humaines ont pour tâche d'accepter ! Cet élan général, s'il perdure de manière durable, aura pour irrémédiable conséquences une disparition de la Culture Générale et des «  Humanités », un mépris ( déjà existant) envers toutes les formations à caractère dit «  fondamental » au profit des formations à caractère dit «  appliqué », une uniformisation dramatique des mentalités et des visions du monde qui facilitera la progression de l'idéologie mondialiste et peut-être même, une disparition à terme des Grands organismes de recherche publics ( CNRS, CEA, INRIA...). C'est pour éviter de telles perspectives que je propose cette planche que j'axerai sur trois axes : Ecole primaire, Enseignement Secondaire et Enseignement supérieur. Au sein de chaque axe, je dresserai un court état des lieux en insistant sur ce qui à mes yeux est le plus problématique avant de proposer des grandes lignes de réforme, à caractère général ce papier n'ayant pas vocation à être un rapport exhaustif.

  1. L'école Primaire. L'école primaire est en principe un noyau dur de l'enseignement obligatoire. On y apprend à maitriser la lecture, l'écriture et le calcul. En plus de cela, l'enfant doit être éveillé aux concepts de respect d'autrui ( instituteur et camarades de classe), de citoyenneté et de civisme. Il doit prendre conscience qu'il évolue certes dans le temps et dans l'espace, mais plus particulièrement au sein d'une communauté d'individus tous différents, tous avec leurs richesses et leurs défauts propres. Il est fondamental de lui expliquer que cette communauté d'individus, si elle souhaite pouvoir interagir avec harmonie, implique des règles, des droits et des devoirs. L'approche libertarienne actuelle développée dès les premières classes doit être combattue avec énergie au sein de l'école de la république car elle ne peut former que des enfants et donc des futurs adultes individualistes qui n'aspireront sans cesse qu'à s'émanciper des règles de vie commune et à détourner la recherche de l'intérêt commun en obsession de la satisfaction individuelle. Pourtant, notre pays de France jouit d'un merveilleux moyen pour lutter contre ce phénomène, sa devise ! «  Liberté, Egalité, Fraternité ». Voilà le sens véritable qu'il est nécessaire d'inculquer à nos enfants à cette période du cycle scolaire, à savoir, l'épanouissement individuel et la reconnaissance de l'épanouissement d'autrui sublimés tous deux par le sentiment d'appartenance commun à la République. Tout est dans cette belle devise, si ce n'est peut-être le mot laïcité qu'il faudra un jour ajouter à cette époque d'émergence des communautarismes religieux. Ne retenons que l'égalité et nous sombrerons dans le communisme le plus ravageur, ne retenons que la liberté et le néo-libéralisme actuel aura vaincu ! Cet équilibre est fondamental et il est nécessaire d'insister dessus durant les premières années car rappellons-nous que nous ne sommes pas là pour former uniquement des têtes bien pleines, mais surtout des futurs citoyens à la tête bien faite !
Le second sujet fondamental à mes yeux n'est autre que la langue française ! Il faut donner durant les premières années le goût de notre belle langue française, constituant fondamental de la culture et de la Nation, que cette dernière soit pensée par Renan ou par Fichte ! De la poésie, du théâtre, du roman qu'importe mais qu'ils lisent et lisent encore et faisons en sorte pour ce faire que les derniers bastions de la méthode globale tombent ! A quoi bon imposer des heures et des heures d'anglais ou d'allemand à des petits français qui ont des lacunes dans leur langue maternelle ? Faisons les choses avec méthode et logique, qu'ils maîtrisent leur langue ( nous ne leur demandons pas de maîtriser le plus que parfait du subjonctif en CE2...) avant de s'intéresser de la manière la plus naturelle qui soit aux langues étrangères. Aujourd'hui, 40 % des élèves sortent de l'école primaire avec des bases trop fragiles en lecture, écriture et calcul et environ 15% sont illetrés !! Est-ce concevable en France en 2012 ? Nous devons donc définir dans un premier temps un socle commun de connaissances qu'il sera fondamental de posséder pour pouvoir entrer en 6ème. Les constituants de ce socle commun sont à définir avec précision mais il est évident que la parfaite connaissance des temps de l'indicatif, de la grammaire, de la syntaxe et des 4 opérations élémentaires en font partie.

  1. Enseignement secondaire.

Certains nous parlent de la fin du collège unique, c'est une absurdité ! Il est nécessaire que tout jeune puisse bénéficier d'une scolarité générale de la classe de 6ème à la classe de 3ème où il pourra ressentir en lui son goût ou non pour les études. Les quatre années du collège sont importantes car en dépit du fait que les connaissances enseignées soient encore d'un niveau relativement modeste, elles permettent de stimuler l'enfant, de le confronter plus volontairement à la pluridisciplinarité et faire germer en son esprit des projets pour l'avenir, que ces projets aient été stimulés plutôt par une matière ou plutôt par un enseignant dont le charisme a été marquant pour lui. Bien évidemment, la priorité doit aller une fois de plus aux Mathématiques et au Français où l'élève aura la possibilité tout au long de ces quatre années d'approfondir ses connaissances et de développer ses capacités de raisonnement. C'est à cette période que les grands classiques doivent être données à lire en fonction de l'âge pour développer l'esthétique, le sens des valeurs, le goût de l'engagement, la sensibilité, l'amour de la connaissance et du voyage... Pensons aux «  Trois Mousquetaires », au «  Grand Meaulnes », aux oeuvres de Jules Verne, de Maupassant, de Lovecraft, au «  Conte du Graal » ou encore à Molière et Victor Hugo ! Le programme d'histoire est également fondamental car à la fin de la 3ème, un élève doit impérativement avoir abordé sérieusement la Grèce de Péricles, le Moyen-âge, la Renaissance et toute l'Histoire de France de la chute de l'Ancien Régime au début du 3ème millénaire. La période Révolution Française-Consulat-Empire(s) jusqu'à la défaite de Sedan est un passage clef de notre Histoire car elle explique et détaille l'émergence des fondements de l'Etat moderne tout en réalisant un panorama unique de l'échantillon politique français qui permettra aux futurs adultes n'ayant pas lu René Rémond d'éviter les confusions hasardeuses entre Bonapartisme, Orléanisme et Légitimisme … Un examen tel le brevet doit être maintenu dans l'esprit à la fin du collège si le niveau est relevé car actuellement, le brevet des collèges ne sert à rien si ce n'est à préparer psychologiquement à la tenue d'examens postérieurement.
C'est selon moi à la fin du collège que la première sélection doit se faire, et une sélection fondamentale car à quoi bon envoyer des jeunes dans le cursus d'un lycée général si ils savent déjà que les études ne leur conviennent pas ? Qu'ils aspirent à une existence moins académique, moins codifiée et préfèrent se consacrer à l'âge de 16 ans à l'apprentissage d'un métier ? C'est pour cette raison qu'il est fondamental de relancer l'apprentissage dans notre pays qui permettra à de nombreux jeunes de se sentir épanouis en acquérant tôt une qualification professionnelle en entreprise, en CFA ou dans le secteur public. Dans le même esprit, les baccalauréats technologiques et professionnels doivent être soutenus et débarassés de la connotation négative qu'ils portent parfois de manière totalement injustifiée car la France a besoin de tous les profils pour être riche et pas seulement du «  Philosophe-Roi » tant loué par Platon. En 2010, la proportion de bacheliers sur une génération était de près de 66% , un tel chiffre est-il vraiment utile ? Voulons-nous faire du quantitatif à tout pris pour être fiers devant les chiffres de l'INSEE ou voulons-nous assurer à chaque enfant épanouissement et place dans la société en fonction de sa personnalité et de ses aptitudes propres ? Pour cela, aussi faudrait-il ne pas faire dès le plus jeune âge de la propagande pour certaines professions ayant pour conséquences que certains élèves n'étudient pas pour l'acquisition d'un esprit critique et épanoui mais uniquement pour l'acquisition d'un statut et d'une reconnaissance sociale et pourquoi ? Car la « valeur » actuelle d'un métier n'est pas jugée sur son intérêt, son apport à la communauté ou sa démarche philosophique mais uniquement sur sa rémunération, c'est le message qui est d'ailleurs rabaché en boucles à l'occasion de ces foires qu'on appelle «  Salon de l'Education » dont le dernier a eu lieu tout récemment Porte de Versailles et devinons ensemble quel stand a profité d'une publicité intense sur diverses chaînes d'informations françaises ? Une école d'ingénieurs de conceptions de jeux vidéos... Où le mot sacré «  ingénieur » devenu le plus formidable mot-valise du 21ème siècle suffit à donner toute légitimité à une formation !

Mais revenons-en donc aux contenus des programmes du Lycée et à ce fameux baccalauréat ! Les réformes récentes ont pour vocation de supprimer par exemple une grande partie du programme d'histoire en filière scientifique... Comment prétendre alors que la filière S serait une quelconque «  voie royale » si on n'y forme que des gens en mathématiques sans leur inculquer un niveau de connaissance minimum pour qu'ils puissent se repérer dans le contexte international actuel et méditer le passé pour construire l'avenir ? Il ne faut pas sombrer trop tôt aux chants des sirènes de l'hyperspécialisation actuelle qui voudrait que les jeunes de 18 ans se consacrent déjà à un seul domaine très restreint de compétences munis de belles oeillères leur faisant voir le monde non pas tel qu'il est mais à travers un prisme socio-professionnel déformant et très subjectif. Pour ce faire, oui, la filière S doit avoir un programme de mathématiques et de physique solide ( revenir aux programmes de la filière C et E) car les programmes actuels sont clairement insuffisants et la réforme du Lycée n'a fait qu'agraver ce phénomène. Mais en même temps, il est nécessaire qu'il y ait des cours de bon niveau en Histoire, en Lettres, en Philosophie car ce sont des Honnêtes Hommes que nous voulons former à ce stade et pas des petits pions orientés avec préméditation à une place très particulière dans la société. Bien évidemment, les filières sont là pour poser des priorités, mais je le répète, des PRIORITES, mais pas des suppressions pures et simples de disciplines ! Ainsi, un élève en S devra donc avoir un programme d'Histoire cohérent et accentué sur la période 1940-20.. car il est nécessaire qu'il soit informé de manière objective sur la marche du Monde. De même, un élève en filière littéraire devra suivre un cours de mathématiques obligatoire pas forcèment des plus théoriques mais en lien avec des applications pratiques et sociétales ( théorie des probabilités, Statistiques appliquées …). Enfin, de manière globale, les cours de philosophie doivent être instaurés avant la classe de Terminale dans toutes les filières et les langues anciennes fortement encouragées car elles constituent une véritable démarche intellectuelle et un excellent entraînement au raisonnement via la gymnastique des déclinaisons, comme en Allemand d'ailleurs ! L'organisation d'un examen comme le baccalauréat avec les réformes qui seront nécessaires ( plus d'oral et d'évaluation de la capacité de démonstration et de persuasion devant un jury) est en soi un sujet nécessitant un rapport entier, je ne le détaille donc pas ici ne souhaitant indiquer que des grandes lignes. Rappellons cependant qu'à l'heure actuelle, un élève de filière S sans options aura un oral de Français et une soutenance de TPE mais aucun examen oral au tableau devant jury en mathématiques ou en physique. C'est un constat très négatif car l'art oratoire n'est pas uniquement du domaine du droit et de la persuasion, je peux vous assurer qu'un Physicien qui souhaite donner de l'impulsion à une de ses publications se doit d'aller l'argumenter devant une réunion formelle ou non constituée par ses pairs s'il souhaite véritablement que la publication accéde à la postérité !

  1. Enseignement Supérieur.

L'enseignement supérieur, c'est avant tout l'épanouissement de l'esprit critique, des temps de réflexion prolongés , des introspections nécessaires et la remise en cause des préjugés. C'est le temps également des choix, des aspirations professionnelles, de la vie active qui commence à se faire voir et ressentir. L'enseignement Supérieur, c'est le goût et l'amour de la liberté par le savoir et la connaissance. Certains ne s'en lasseront jamais et voudront se consacrer à la pure théorie parfois très spéculative, d'autres souhaiteront appliquer leurs connaissances dans des domaines plus proches de la vie de tous les jours, ressentant le désir profond d'améliorer la société. Tous méritent encore une fois l'épanouissement car l'enseignement supérieur, ( et la société civile également), c'est la richesse par la diversité. Ainsi, les Ecoles d'ingénieur, de Commerce, les Universités, les IUT … ont tous leur place car ils fournissent à la société des profils divers aux compétences variées et complémentaires. Mais c'est un équilibre très fragile qu'il faut préserver absolument ! Le système des classes préparatoires aux Grandes Ecoles est une thématique très particulière dans notre pays tout d'abord car elles n'existent véritablement qu'en France. Mais surtout car à la base, de concept pédagogique et très scolaire destiné à préparer au mieux un certain nombre de futurs actifs en leur donnant des outils méthodologiques ( ce qui est tout à fait justifié), elles ont dérivé lentement dans l'opinion commune comme finalité, au point que nombre d'élèves de ces classes préparatoires se soucient bien peu de l'école qu'ils seront en mesure d'intégrer à partir du moment où ils sont passés par la case «  Classe Prépa ». C'est ce début de raisonnement qui à terme lie inextricablement la profession non pas à une passion ou à un engagement mais uniquement à un revenu ! Ce phénomène de classe préparatoire avec une sélection à l'entrée s'est développé en parallèle avec un autre préjugé fort répandu, celui qui consiste à percevoir l'Université française comme un ventre mou laxiste ! Il serait long d'expliquer pourquoi de telles opinions se sont enracinées depuis maintenant plusieurs années. Mais il faut faire en sorte que les lycéens ne soient pas victime d'un discours déformant mais d'un discours juste ! La voie royale absolue n'a pas de sens car la voie royale, c'est celle de son bonheur intellectuel propre ! Les Ecoles de Commerce et d'Ingénieur ont vocation à former des individus spécialisés dans un ou des domaine(s) particuliers en vue d'utilisation et d'applications industrielle ou autre. Les Universités, quant à elles, ont majoritairement vocation à former des chercheurs.
Chercheurs et Ingénieurs sont complémentaires car ils n'interviennent pas au même niveau de la chaîne du savoir et il est donc absurde de vouloir confronter des profils et des démarches intellectuelles qui ne sont pas comparables. Ils peuvent s'enrichir les uns et les autres et par conséquent, les rapprochements déjà existants entre Ecoles et Université doivent être intensifiés via principalement l'instauration de passerelles et de double-diplômes. De même, alors que nous avons en France des Institutions remarquables ( Ecole Normale Supérieure, IHES...), ils n'ont pas la place qu'ils méritent dans le si controversé Classement de Shangai car nos pôles universitaires sont simplement quantitativement trop petits. Il est donc impératif de favoriser les regroupements Universitaires ( tel Paris-Cité par exemple) en vue de créer des structures à échelle internationale qui n'auront aucune peine compte tenu de l'excellence de nos chercheurs à concurrencer les soi-disantes exceptions anglo-saxonnes. Enfin, une partie des programmes de 1ème année ( je pense en particulier aux Mathématiques et à la Physique) doit être impérativement renouvelée en translatant une partie de ses contenus à la classe de terminale. En effet, l'écart important qui existe actuellement entre la Terminale et la 1ère année de Licence est en partie responsable des taux d'échecs importants. Pour résoudre ce problème, il suffit de favoriser la continuité du contenu et des enseignements afin que les élèves aient le sentiment quand ils arrivent en cours de 1ère année qu'ils approfondissent dans un premier temps les cours de l'année précédente sans découvrir un tout autre monde, ce sentiment psychologique de contuinité favorisera la confiance de l'élève et ne pourra que l'aider à réussir. Un simple exemple, dans les années 80, tout élève de terminale C maîtrisait la notion d'espace vectoriel fondamental autant en Mathématiques qu'en Physique. Aujourd'hui, il faut attendre la classe de Mathématiques Supérieures ou la 1ère année de licence pour qu'elle soit simplement évoquée... Et les exemples de ce genre sont nombreux !
J'espère qu'à travers ces premières pistes, réflexions et constats, une large interrogation s'ouvrira pour permettre à la France de s'émanciper du «  savoir pratique » et de se réconcilier définitivement avec la connaissance comme levier d'émancipation et construction de l'individu. Elle le mérite bien !
«  Si la connaissance peut créer des problèmes, ce n'est pas par l'ignorance que nous pourrons les résoudre » Isaac Asimov

jeudi 1 mars 2012

Quelle place pour les services publics en 2012 ?

Préambule
A notre époque le mondialisme exprime une volonté délibérée d'uniformisation des cultures par un alignement idéologique sur la financiarisation de l’ activité économique et ce au mépris des droits des peuples à disposer d'eux-mêmes .
Le corolaire de ces nouveaux dogmes est le dessaisissement de l’ Etat de son rôle régalien qualifié de notion obsolète. En effet la propagande ultra-libérale se fait le relais de la stigmatisation des services publics qualifiés d’ archaïques, alors que je fais mienne une conception de l’ Etat républicain comme garant de la continuité des services publics de qualité assurant l’ Egalité réelle entre tous les citoyens de la Nation .

Pour commencer à poser ce problème quelques chiffres qui ne concernent que la France. Les économistes évaluent à 91,5 milliards le déficit public et à près de 1800 milliards la dette publique, sans parler évidemment d'une balance commerciale fortement déficitaire. Dans ces conditions, si l'on tient compte des engagements des états européens de ramener à l'horizon 2013-2014 le déficit public à 3% du PIB, une politique d'austérité , avec comme composante un certain sacrifice du service public ( au nom de la crédibilité internationale et financière de la France )semble nécessaire voire indispensable. C'est le discours actuel officiel des gouvernements, du moins des pays qui s’arrogent la direction du conseil européen , de la commission de Bruxelles et du F.M.I , qui forment un nouveau triumvirat ( la « Troika »)chargé de la politique européenne en coordination avec les Banques dont certaines ont largement induit, et profité , de la crise financière actuelle ).

Je conçois la République comme l’expression d’un Etat maître incontestable des fonctions régaliennes nécessaires à l'équilibre national dont la solidarité .

Selon mes idéaux la triade Liberté ,Egalité ,Fraternité ne se décline pas dans une hiérarchie de ces valeurs .Les deux concepts de Liberté et d’Egalité ne sont pas antagonistes mais doivent s’unir par un moyen terme humaniste : la Fraternité.

L'une des expressions opératives de l’Egalité directement liées aux droits inaliénables de l'Individu, est l’ accès à des services publics de qualité ,je pense en particulier au droit au travail , au logement, aux soins de qualité , à l'éducation publique ...

Ainsi chaque citoyen possède un certain nombre de devoirs, car il appartient à une communauté dont les règles de vie doivent être établies sans ambiguïté pour éviter le chaos .Mais il bénéficie également de droits fondamentaux , dont une partie importante , qui rend réelle la citoyenneté effective, doit être assurée par les Services Publics qui constituent alors le vecteur fondamental de la perpétuation et de la cohésion de la communauté nationale. Si nous souhaitons que les citoyens en aval, fassent profiter leur Nation de leurs compétences diverses, il faut bien les y former en amont de manière juste .La République donc l’ Etat doit leur assurer la sécurité et une existence digne de leur qualité de citoyen ,égaux certes face à la Loi mais aussi non soumis à une disparité inacceptable de fortune , surtout si celle-ci est acquise par héritage ou des moyens illégaux ou injustes .

Une destruction programmée des services publics serait inévitablement suivie de la prééminence des services privés et alternatifs dont la finalité est ouvertement de faire du profit et dont l’accès sélectif à ces services se fait au plus offrant ,c’est-à-dire aux plus fortunés .La généralisation de cette privatisation deviendrait à terme totalement contradictoire avec les concepts de méritocratie, de Liberté et d'Egalité. Nous en constatons dès maintenant les prémices par la constante augmentation des inégalités dans mains secteurs de l’activité .

Rappelons avant de poursuivre quelques notions fondamentales sur l’Histoire des services publics à travers les lois dites de Rolland (principes réglementaires qui nous ont été donnés par le professeur Louis Rolland à partir de 1934). Ces Lois peuvent se résumer en trois grands principes :
Le principe de continuité : repose sur l’idée que la prise en charge d’un besoin impérieux par le service public lui donne sa légitimité ; il est dès lors inconcevable que le service fonctionne par à-coup et connaisse des interruptions brutales.
Le principe d’égalité : exige que tous les citoyens qui entrent en contact avec le service public soient placés dans une position égale (extension de la Déclaration de 1789).
Le principe de mutabilité: implique que les prestations fournies au public soient toujours adaptées à ses besoins ; si les circonstances changent ou si les usagers présentent de nouvelles exigences, les services publics doivent s’adapter (ils sont soumis à la loi du «progrès », leurs prestations doivent sans cesse augmenter en qualité et en quantité).

S‘y ajoutent, depuis peu, les principes de transparence et de concertation. Ces nouveaux principes sont issus d’une part de la volonté de briser la corruption qui parasitait de nombreux secteurs, et d’autre part de la prise en compte de la démocratie locale (associations, collectivités territoriales…). Les nationalisations mettront fin aux coûts prohibitifs des prestations assurées par des entreprises en situation de position dominante.

Enfin, le principe de participation (souvent appelé « démocratisation du service public ») qui, bien que figurant au rang des acquis de la Résistance (tripartisme), ne fut que trop rarement appliqué et qui ressurgit aujourd’hui sous la forme de conseils consultatifs (CCSPL, Comités d’usagers d’une ligne TER, Observatoires des services publics de l’électricité, etc…..).

Nous constatons alors que ces principes sont des vecteurs essentiels du concept d’intérêt-général qui est un fil conducteur de notre problématique et du concept républicain lui-même. Ils furent d’ailleurs pris comme piliers du programme du Conseil National de la Résistance dès 1944. Cependant, ils n’apparaissent nullement au sein de la constitution de 1958 dont je rappele ci-après l’article 1 :
La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.

Cette constitution se révèle être assez floue sur la notion d’intérêt général. Ce constat ne serait-il pas le nœud Gordien des difficultés évoquées précédemment ?

Ces mêmes difficultés se sont fortement accrues avec l'émergence idéologique de la pensée commerciale mondialiste où le qualitatif est devenu obsolète face au quantitatif et où la pensée marchande, dans sa volonté et sa recherche sans fin du profit au détriment de la qualité, a détruit l'idée initiale de libéralisme ( bonne en elle-même car en adéquation avec le principe d'émancipation de l'Individu ) pour y substituer un leitmotiv de la concurrence universelle où cette dernière, qui avait initialement pour but de favoriser l’émulation (en elle-même facteur de progrès par l’innovation qu’elle favorise ), est devenue une arme destructrice de l'idée même de service public, c'est à dire dans le fond, de service à but non lucratif mais humaniste.

Car cette concurrence est faussée ! Tirant profit de prix compétitifs à coup de non-respect de lois sociales élémentaires, de bas salaires, de dumping économique ( fausse vraies subventions étatiques) ,dissimulation de profits pour échapper à l’impôt etc.

Il est également nécessaire et fondamental d'ajouter que l’actuel démantèlement programmé des services publics n’est, en fin de compte, qu’une étape dans la révolution néolibérale. Il est évident qu’il ne s’agit pas là de la fin d’un long processus. La deuxième étape, après l’anéantissement des services publics, consistera vraisemblablement à mettre fin intégralement à l’existence de la puissance publique des Etats ( il a été question au XIXème siècle du dépérissement de l’ Etat dans un tout autre contexte !).

Au bout du compte, le droit privé devrait ici retrouver une plénitude de ses acquis par l'intermédiaire de l'établissement de la contrainte du contrat individualisé et généralisé. Là est en réalité la vraie finalité du néolibéralisme, c’est-à-dire la fin programmée d’une démocratie dont on a soustrait ses droits collectifs. Un indéniable retour aux sources d’un libéralisme qui a précédé le long cheminement d’un Etat ayant puisé historiquement ses fondements dans la nation.

A ce phénomène, nous pouvons et nous devons y opposer une réponse politique. En guise d'illustration, le Discours d'Ernest Renan « Qu'est-ce qu'une Nation » constitue une formidable référence , car ce discours, qualifiant la Nation d'âme permet de comprendre avec intelligence et loin de tout fanatisme que le seul cadre géopolitique véritablement viable est celui de l'Etat-Nation dans ce qu'il a de plus universel, par le désir de vivre ensemble , la valorisation de la solidarité , de la recherche de la justice sociale , de l’émulation , du bonheur ( à contrario du modèle Allemand de l'Etat-Nation plutôt défendu par Fichte.)

mercredi 18 janvier 2012

Un nouvel Ordre Mondial... Oui, mais lequel ?



Depuis à présent plusieurs années, la thématique du nouvel ordre mondial est devenue un archétype idéologique au sein de nombreux débats politiques et sociaux, dépassant assez aisément le clivage politicien droite-gauche, mettant d'accord une part non négligeable des élites politiques contemporaines, à un tel point que les opposants à cette idée sont souvent assimilés comme sympathisants extrémistes de droite comme de gauche, indiquant déjà la qualité de la liberté d'expression... La société actuelle, perçue par la plupart plus
comme source de marasme qu'autre chose, laisserait penser que ce nouvel ordre mettrait tout le monde d'accord dans le principe car représentant un changement radical de notre
société. Certes, mais vers quelle société souhaitons-nous évoluer ?

Qui n'a jamais entendu la maxime " Les problèmes de l'humanité doivent être résolus par l'humanité toute entière " ? Cette affirmation, justifiant la construction et l'établissement de blocs politiques tels que l'Union Européenne bien sûr, mais également l'Alena, le Mercosur ou encore, l'hypothétique Union Méditerranéenne. Cependant, ces unions ont-elles pour but de régler les problèmes à l'échelle planétaire tels que l'analphabétisation, le non accès à l'eau potable, la progression du vih ... ? Rappelons seulement que notre Union Européenne a pour ancêtre la communauté économique du charbon et de l'acier, que l'Alena ne désigne rien d'autre que l' " Accord de libre échange nord-américain " et qu'enfin, le Mercosur fut fondé en 1991 dans l'unique but de favoriser la libre circulation des biens et des facteurs de production dans une large partie de l'Amérique du sud. Autrement dit, par ces sous-entendus que j'espère percutants, je souhaite faire comprendre que ces unions n'ont d'intérêts que commerciaux et financiers. Comprenez bien, quand on se connait parfaitement, on a nettement plus tendance à se faire confiance pour toutes sortes de transactions. Certes, me direz-vous, de telles zones de libre échange ont aussi des impacts positifs : elles permettent d'équilibrer la balance du commerce extérieur, de renforcer la diplomatie, d'ouvrir vers l'autre, de créer de la croissance... Je suis absolument d'accord avec vous ! L'industrie d'un pays doit vivre, produire et bien évidemment vendre, acquérir une réputation et engendrer une dynamique. Cette dynamique peut très bien exister à l'échelle nationale, mais avec l'établissement de solides partenariats internationaux , la dite industrie pourra prospérer plus facilement.

Cependant, l'existence de ces partenariats n'est pas un problème en soi, le problème, c'est de se demander si ils constituent des finalités. Et là, le véritable problème se pose. Pour les raisons ( non exhaustives) qui viennent d'être énoncées précédemment, nous tendons de plus en plus vers la globalisation. Mais s'est-on déjà interrogé sur les conséquences que cela pourrait avoir ? Que fait-on de la marchandisation systématique qui s'en suivra des biens et des personnes ? Ne parlons-nous pas déjà au sein du monde de l'entreprise de "
Ressources Humaines " ? Si le système actuel d'internationalisme financier se poursuit et même s'intensifie, les êtres humains, le savoir, les connaissances, l'eau potable deviendront par exemple de purs produits marchands et la notion pourtant si symbolique de " Patrimoine commun de L'Humanité " disparaîtra. Déjà, actuellement, les élèves français comme ceux d'autres pays se voient comme des clients qui pourraient faire leur marché au sein des offres de cours proposées, aspirations auxquelles répondent favorablement les
gouvernements dont le nôtre qui impose une réforme du Lycée ( en attendant celle du collège) " à la carte". Pourra-t-on encore longtemps poursuivre dans cette logique de la marchandisation systématique au sein d'un espace géographique devenu très flou où l'échelle locale est maintenue en vie artificiellement à l'aide d'une législation bureaucratique obscure mais où en réalité le concept d'Etat-Nation, si cher à Ernest Renan, et seul cadre viable pour une politique efficace et humaniste, est chaque jour bafoué, méprisé et écrasé face à une dynamique du " toujours plus grand", " toujours plus étendu " favorisant les nominations technocratiques évitant le filtre du suffrage universel ? Où sont les intérêts des peuples ? Où est le respect de la démocratie, de la république et du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ? Ce nouvel ordre mondial se voudrait universaliste avec ses mots-valises de " Citoyen du Monde" ou de " Monde-Village", mais il confond universalisme et impérialisme idéologique ! Il semblait logique il y a encore plusieurs décennies que
certaines valeurs, certains patrimoines ne pourraient jamais être abaissés au niveau de la pensée marchande, de l'évaluation monétaire et quantitative. Aujourd'hui, ces aspirations semblent bien naïves et on se demande ce qui pourrait résister à cet état d'esprit.

Si nous laissons les valeurs, les us, les coutumes et les cultures respectives de tous les états du monde être brassées sans état-d'âme en un magma dénaturé, uniformisé et médiocre à échelle planétaire, nous pourrons dire adieu à notre statut de citoyen responsable pour devenir de serviles consommateurs et victimes d'un système dont le but réel n'est autre que l'aliénation. Mais il n'est pas encore trop tard pour inverser cet élan, nous aurons simplement besoin de courage, de volonté et d'une certaine idée de l'Homme !

mardi 10 janvier 2012

Bonheur et Souffrance en mathématiques.

La dualité souffrance-bonheur fut depuis les débuts de la philosophie une thématique riche aux multiples horizons. Il est souvent considéré comme évident voire comme tautologique de définir le bonheur comme l'absence totale de souffrances. Le but de cet essai sera alors de se demander si au lieu d'un rapport d'opposition, de négation logique, il ne serait pas plutôt question de conséquences, d'étapes d'un même cheminement que l'on pourrait presque qualifier d'initiatique, et ce dans le domaine particulier des mathématiques.

En effet, avant même de s'interroger sur les places respectives du bonheur et de la souffrance dans la vie du mathématicien, est-on en mesure de définir avec une grande rigueur ce que sont les mathématiques ? Création de l'esprit humain pour certains, vérité transcendante pour d'autres, il n'est pas encore permis de lever l'ambiguïté suivante sur le statut du mathématicien, découvreur ou créateur ? L'ouvrage intitulé «  Matière à penser » illustre à la perfection cette interrogation centrale. Dans ce livre, le neurologue Jean-Pierre Changeux et le mathématicien Alain Connes s'opposent courtoisement sur leur vision des mathématiques. Alors qu'Alain Connes défend une position purement platonicienne, Jean-Pierre Changeux se range le long d'une approche bien plus pragmatique. Pour ma part, l'approche platonicienne est celle qui donne du sens, de la transcendance à la discipline mathématique. Tout mathématicien, simple étudiant ou Médaille Fields, s'est senti un jour écrasé sous le poids d'une démonstration ou d'une équation. Mais quelle est l'origine réelle de ce sentiment ? Se sent-on écrasé par la lourdeur d'un formalisme qui nous dépasse ? Mais qui est l'auteur de ce formalisme ? Nous mêmes ! L'être humain ne peut que très difficilement se sentir dépassé de manière universelle par sa propre création, du moins, à long terme. En effet, si le genre humain se devait d'être universellement dépassé par un pur fruit de son esprit, cela signifierait tout simplement qu'il est en déclin, en régression générale et voué à disparaître. Or, bien que le genre humain au niveau global soit en fort déclin, il ne l'est pas pour cette raison, mais pour une multitude d'autres qui n'ont pas leur place dans cet essai. Ainsi, si le mathématicien se sent parfois si extérieur à ce qu'il voit sur le tableau , c'est qu'une barrière s'est dressée entre le formalisme et le sens ou devrais-je dire la syntaxe et le sens ! Ainsi, si il est aisément pensable que le formalisme mathématique soit une création de l'Homme, ce que ce formalisme décrit réellement n'en est probablement pas une. Nous ne sommes en mesure actuellement que de décrire des phénomènes, c'est à dire, des représentations particulières de la chose en soi, représentations elles-mêmes adaptées à notre psychologique propre. Le problème pourrait s'arrêter alors sur ce constat amère et oh combien douloureux pour l'Homme, animal politique et donc profondément orgueilleux...

Mais contrairement à l'approche Kantienne, il me semble que la volonté et la soif d'absolu ne soient pas uniquement du domaine de l'utopie ou du clérical... Et là arrive la douleur, douleur de l'Homme, du mathématicien qui veut percer le réel secret et les réelles potentialités de sa discipline. Il est regrettable que tant de personnes abhorrent les mathématiques pour des raisons de formalisme jugé obscur et impénétrable car le formalisme est une étape nécessaire mais ne constitue aucunement un aboutissement. Il est représentatif de l'effort, de la douleur, de la souffrance, de la perte d'espoir qui traverseront nombre de fois les cœurs des plus passionnées, des plus avides de connaissance et de sens ! L'aventure mathématique est un chemin initiatique où l'on apprend à se connaître soi-même avant de connaître l'autre. Il ne peut y avoir de bonheur mathématique sans souffrance préalable. Et les souffrances sont nombreuses... Panne sèche d'inspiration devant un exercice, angoisse devant un nouveau chapitre, un nouveau concept ou même parfois, un nouvel espace localement convexe ou pas ! Mais aussi, incompréhension totale devant un cours jugé obscur qui nous fait regarder le tableau noir avec la même lueur de désespoir que celle du condamné face à son bourreau.

Mais oh combien les bonheurs consécutifs sont intenses, et chaque fois, révélateurs de notre admiration pour une science qui ne cesse de nous étonner, de nous impressionner et de nous remettre à notre place, notre véritable place ! Et une fois que ces petits bonheurs et ces petites souffrances ont forgé notre caractère et même notre âme, une ultime vocation intellectuelle s'éveille en nous , la chose en soi, le fond de la connaissance, l'être de l'étant selon les écoles. Et alors, le mathématicien se sent prêt à affronter toutes les souffrances de l'esprit voire même du corps qui sont envisageables car au bout de ce cheminement, de ces pérégrinations intellectuelles qui s'avèreront nombreuses et pour beaucoup infructueuses, se cache peut-être le sens même de cette discipline, un sens tel qu'à ce niveau, le mot même de discipline n'a plus de signification. La discipline est un chemin, le sens est une destination. Peut-être et même probablement, le sens, l'être de la chose en soi demeurera toujours caché au mathématicien comme au philosophe, mais en y réfléchissant bien, le fait de pouvoir approcher asymptotiquement ce Graal sans jamais le toucher, et donc permettre à l'homme éternellement de demeurer perfectible sans sombrer dans une destructive perfection, n'est-ce pas cela le véritable Bonheur ?