jeudi 1 mars 2012

Quelle place pour les services publics en 2012 ?

Préambule
A notre époque le mondialisme exprime une volonté délibérée d'uniformisation des cultures par un alignement idéologique sur la financiarisation de l’ activité économique et ce au mépris des droits des peuples à disposer d'eux-mêmes .
Le corolaire de ces nouveaux dogmes est le dessaisissement de l’ Etat de son rôle régalien qualifié de notion obsolète. En effet la propagande ultra-libérale se fait le relais de la stigmatisation des services publics qualifiés d’ archaïques, alors que je fais mienne une conception de l’ Etat républicain comme garant de la continuité des services publics de qualité assurant l’ Egalité réelle entre tous les citoyens de la Nation .

Pour commencer à poser ce problème quelques chiffres qui ne concernent que la France. Les économistes évaluent à 91,5 milliards le déficit public et à près de 1800 milliards la dette publique, sans parler évidemment d'une balance commerciale fortement déficitaire. Dans ces conditions, si l'on tient compte des engagements des états européens de ramener à l'horizon 2013-2014 le déficit public à 3% du PIB, une politique d'austérité , avec comme composante un certain sacrifice du service public ( au nom de la crédibilité internationale et financière de la France )semble nécessaire voire indispensable. C'est le discours actuel officiel des gouvernements, du moins des pays qui s’arrogent la direction du conseil européen , de la commission de Bruxelles et du F.M.I , qui forment un nouveau triumvirat ( la « Troika »)chargé de la politique européenne en coordination avec les Banques dont certaines ont largement induit, et profité , de la crise financière actuelle ).

Je conçois la République comme l’expression d’un Etat maître incontestable des fonctions régaliennes nécessaires à l'équilibre national dont la solidarité .

Selon mes idéaux la triade Liberté ,Egalité ,Fraternité ne se décline pas dans une hiérarchie de ces valeurs .Les deux concepts de Liberté et d’Egalité ne sont pas antagonistes mais doivent s’unir par un moyen terme humaniste : la Fraternité.

L'une des expressions opératives de l’Egalité directement liées aux droits inaliénables de l'Individu, est l’ accès à des services publics de qualité ,je pense en particulier au droit au travail , au logement, aux soins de qualité , à l'éducation publique ...

Ainsi chaque citoyen possède un certain nombre de devoirs, car il appartient à une communauté dont les règles de vie doivent être établies sans ambiguïté pour éviter le chaos .Mais il bénéficie également de droits fondamentaux , dont une partie importante , qui rend réelle la citoyenneté effective, doit être assurée par les Services Publics qui constituent alors le vecteur fondamental de la perpétuation et de la cohésion de la communauté nationale. Si nous souhaitons que les citoyens en aval, fassent profiter leur Nation de leurs compétences diverses, il faut bien les y former en amont de manière juste .La République donc l’ Etat doit leur assurer la sécurité et une existence digne de leur qualité de citoyen ,égaux certes face à la Loi mais aussi non soumis à une disparité inacceptable de fortune , surtout si celle-ci est acquise par héritage ou des moyens illégaux ou injustes .

Une destruction programmée des services publics serait inévitablement suivie de la prééminence des services privés et alternatifs dont la finalité est ouvertement de faire du profit et dont l’accès sélectif à ces services se fait au plus offrant ,c’est-à-dire aux plus fortunés .La généralisation de cette privatisation deviendrait à terme totalement contradictoire avec les concepts de méritocratie, de Liberté et d'Egalité. Nous en constatons dès maintenant les prémices par la constante augmentation des inégalités dans mains secteurs de l’activité .

Rappelons avant de poursuivre quelques notions fondamentales sur l’Histoire des services publics à travers les lois dites de Rolland (principes réglementaires qui nous ont été donnés par le professeur Louis Rolland à partir de 1934). Ces Lois peuvent se résumer en trois grands principes :
Le principe de continuité : repose sur l’idée que la prise en charge d’un besoin impérieux par le service public lui donne sa légitimité ; il est dès lors inconcevable que le service fonctionne par à-coup et connaisse des interruptions brutales.
Le principe d’égalité : exige que tous les citoyens qui entrent en contact avec le service public soient placés dans une position égale (extension de la Déclaration de 1789).
Le principe de mutabilité: implique que les prestations fournies au public soient toujours adaptées à ses besoins ; si les circonstances changent ou si les usagers présentent de nouvelles exigences, les services publics doivent s’adapter (ils sont soumis à la loi du «progrès », leurs prestations doivent sans cesse augmenter en qualité et en quantité).

S‘y ajoutent, depuis peu, les principes de transparence et de concertation. Ces nouveaux principes sont issus d’une part de la volonté de briser la corruption qui parasitait de nombreux secteurs, et d’autre part de la prise en compte de la démocratie locale (associations, collectivités territoriales…). Les nationalisations mettront fin aux coûts prohibitifs des prestations assurées par des entreprises en situation de position dominante.

Enfin, le principe de participation (souvent appelé « démocratisation du service public ») qui, bien que figurant au rang des acquis de la Résistance (tripartisme), ne fut que trop rarement appliqué et qui ressurgit aujourd’hui sous la forme de conseils consultatifs (CCSPL, Comités d’usagers d’une ligne TER, Observatoires des services publics de l’électricité, etc…..).

Nous constatons alors que ces principes sont des vecteurs essentiels du concept d’intérêt-général qui est un fil conducteur de notre problématique et du concept républicain lui-même. Ils furent d’ailleurs pris comme piliers du programme du Conseil National de la Résistance dès 1944. Cependant, ils n’apparaissent nullement au sein de la constitution de 1958 dont je rappele ci-après l’article 1 :
La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.

Cette constitution se révèle être assez floue sur la notion d’intérêt général. Ce constat ne serait-il pas le nœud Gordien des difficultés évoquées précédemment ?

Ces mêmes difficultés se sont fortement accrues avec l'émergence idéologique de la pensée commerciale mondialiste où le qualitatif est devenu obsolète face au quantitatif et où la pensée marchande, dans sa volonté et sa recherche sans fin du profit au détriment de la qualité, a détruit l'idée initiale de libéralisme ( bonne en elle-même car en adéquation avec le principe d'émancipation de l'Individu ) pour y substituer un leitmotiv de la concurrence universelle où cette dernière, qui avait initialement pour but de favoriser l’émulation (en elle-même facteur de progrès par l’innovation qu’elle favorise ), est devenue une arme destructrice de l'idée même de service public, c'est à dire dans le fond, de service à but non lucratif mais humaniste.

Car cette concurrence est faussée ! Tirant profit de prix compétitifs à coup de non-respect de lois sociales élémentaires, de bas salaires, de dumping économique ( fausse vraies subventions étatiques) ,dissimulation de profits pour échapper à l’impôt etc.

Il est également nécessaire et fondamental d'ajouter que l’actuel démantèlement programmé des services publics n’est, en fin de compte, qu’une étape dans la révolution néolibérale. Il est évident qu’il ne s’agit pas là de la fin d’un long processus. La deuxième étape, après l’anéantissement des services publics, consistera vraisemblablement à mettre fin intégralement à l’existence de la puissance publique des Etats ( il a été question au XIXème siècle du dépérissement de l’ Etat dans un tout autre contexte !).

Au bout du compte, le droit privé devrait ici retrouver une plénitude de ses acquis par l'intermédiaire de l'établissement de la contrainte du contrat individualisé et généralisé. Là est en réalité la vraie finalité du néolibéralisme, c’est-à-dire la fin programmée d’une démocratie dont on a soustrait ses droits collectifs. Un indéniable retour aux sources d’un libéralisme qui a précédé le long cheminement d’un Etat ayant puisé historiquement ses fondements dans la nation.

A ce phénomène, nous pouvons et nous devons y opposer une réponse politique. En guise d'illustration, le Discours d'Ernest Renan « Qu'est-ce qu'une Nation » constitue une formidable référence , car ce discours, qualifiant la Nation d'âme permet de comprendre avec intelligence et loin de tout fanatisme que le seul cadre géopolitique véritablement viable est celui de l'Etat-Nation dans ce qu'il a de plus universel, par le désir de vivre ensemble , la valorisation de la solidarité , de la recherche de la justice sociale , de l’émulation , du bonheur ( à contrario du modèle Allemand de l'Etat-Nation plutôt défendu par Fichte.)

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